Salarié et entrepreneur de spectacles : un cumul possible
La Cour de cassation s’est récemment penchée sur la question des conditions du cumul du contrat de travail avec une licence d’entrepreneur de spectacles. Cet arrêt est intéressant car c’est probablement la première fois qu’elle se prononce sur ce cas.
Faits et procédure
Une association culturelle embauche un intermittent du spectacle en qualité d’artiste : jusque-là, rien d’exceptionnel. La situation se complique dès lors qu’il est précisé que ce salarié est fondateur et membre du conseil d’administration de l’association et que, par ailleurs, il perçoit de la part de Pôle emploi une allocation de retour à l’emploi (ARE).
Suite à un contrôle en novembre 2015, Pôle emploi suspend le versement de l’ARE et sollicite la restitution de l’indu. Par jugement du 27 octobre 2016, le tribunal de grande instance de Marseille (n° 16/10209) rejette les prétentions du salarié et le condamne à restituer à Pôle emploi la somme de 11 821 euros reçue au titre de l’ARE du 27 octobre 2013 au 19 juillet 2015, à payer 1 000 euros au titre des dommages et intérêts, 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens, le tout assorti de l’exécution provisoire. Le salarié relève appel de cette décision.
Prétentions des parties
Pôle emploi fait valoir que, contrairement au principe de solidarité qui a présidé à la création du régime spécial d’indemnisation des salariés intermittents du spectacle vivant et de l'audiovisuel, l’intéressé est quasi exclusivement le salarié intermittent d'un seul employeur – en l’espèce, l'association – puisque sur 93 périodes d'emploi déclarées entre octobre 2012 et novembre 2015, cette association est apparue 85 fois comme étant son employeur.
De son côté, le salarié soutient notamment que :
- lorsque l’activité d’entrepreneur de spectacles est exercée par une personne morale, comme au cas d’espèce par une association, la licence est accordée en application de l’article L. 7122-5 du code du travail au dirigeant désigné par l’organe délibérant prévu par les statuts ;
- il est employé en qualité d'intermittent par l’association dont il est l'un des membres fondateurs ;
- il n’est ni président ni trésorier de l’association avec laquelle il est lié par un contrat de travail et un véritable lien de subordination ;
- la présomption de salariat peut lui être appliquée en vertu des dispositions énoncées par l’article L. 7121-3 du code du travail.
Décisions
La cour d’appel rend son arrêt le 13 juin 2018 : elle infirme le jugement (n° 16/21140). Elle estime que la délivrance de la licence n’exclut pas automatiquement l’existence d’un lien de subordination de son titulaire avec l’employeur pour la production de spectacles et que la situation juridique du dirigeant ne suffit pas à prouver son autonomie au sein de l’association.
Pôle emploi se pourvoit en cassation. Pour l’organisme public, le présumé salarié avait fondé l’association et, s’il n’en était pas le dirigeant officiel, il participait néanmoins aux décisions importantes en tant que membre du conseil d’administration.
La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle approuve la cour d’appel et ajoute que le contrat par lequel une personne s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un artiste du spectacle en vue de sa production est présumé être un contrat de travail, à moins que cet artiste n’exerce cette activité dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce (C. trav., art. L. 7121-3). La preuve n’étant pas rapportée par Pôle emploi que l’artiste exerçait son activité en toute autonomie, la présomption de salariat doit lui être appliquée et les prestations rétablies.
Cour de cassation, chambre sociale, 8 juillet 2020, n° 18-21.278
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